Des caribous au pays du couscous

Loi anti-drague: Les femmes s'impatientent !

Les victimes lassées de ces sérénades qui ne tardent pas à virer à la bassesse.
La gêne occasionnée par ces hommes, qui draguent tout ce qui bouge, pourrait disparaitre bientôt. Depuis que l'on parle d'un projet de loi «anti-drague», les espoirs sont plus vifs. En effet, ledit projet de loi (proposé par la ministre Nouzha Skalli), veut pénaliser la drague malsaine sur la voie publique.

Selon les éventuelles futures dispositions (qui traitent aussi de la violence conjugale), prononcer des paroles abjectes à l'égard d'une femme, c'est risquer une peine d'emprisonnement allant d'un mois à deux ans, couronnée d'une amende qui atteindrait 2.000 DH. Quant aux machos aux envies plus poussées (caresses, chatouillement, bisous volés…), ils doivent s'attendre à des châtiments encore plus lourds.

Pour Nouzha Skalli, ministre du Développement social, de la Famille et de la Solidarité, la violence dans la rue et celle au sein du foyer sont les facettes du même médaillon: «Ce projet de loi tient tant à pénaliser toutes les formes de la violence, même s'il ne s'agit que de paroles viles à l'égard d'une personne de sexe féminin». Parlementaire, Milouda Hazeb renchérit sur ce point en rappelant l'importance d'inculquer aux enfants l'égalité entre les sexes et ce, dès leur bas âge. Selon ses mots: «Avant d'appliquer n'importe quel texte de loi, il faut d'abord vulgariser son importance au sein de la société. Si le sexisme est malheureusement un phénomène tolérable dans notre pays, il faudra commencer par l'éradiquer. Et puis, toute la société civile doit rappeler à tout bout de champ que la femme a beaucoup plus de valeur qu'un objet». Pour Bouchra Abdou, membre de la Ligue démocratique pour les droits des femmes(LDDF), ce projet a intérêt à sortir des limbes.

Car seule la justice pourra octroyer un peu de considération à ces mères de familles, ces filles pudiques, ou tout simplement ces jeunes femmes qui ne veulent pas faire de nouvelles connaissances. «Sans loi cadre interdisant strictement la drague dans les rues, l'agression psychique des femmes ne pourra que durer encore et encore. Ce projet de loi doit être voté. Les hommes ne font plus de différence entre une mère enceinte et une fille qui cherche à être séduite», entrevoit cette activiste. Et d'ajouter: «La drague n'est pas loin du harcèlement sexuel. Les deux sont des formes plus ou moins implicites de la violence à l'égard des femmes. De plus, il faut rappeler à certains hommes que la rue n'est pas l'endroit idéal pour faire des rencontres sérieuses».

En effet, nombreuses sont ces jeunes femmes qui rechignent à une sortie en plein air, juste pour esquiver ce désagrément. Respirer de l'air frais dans un jardin public, c'est désormais une mission impossible pour beaucoup d'entre elles. Curieusement, certains hitistes (ndlr: chômeurs qui s'adossent inlassablement contre un mur) ne cessent pas de scruter du regard, à longueur de journée, toutes les jeunettes qui passent dans leur champ de vision.

Victimes de la rue
Fatima-Zahra est une jeune casablancaise. Comme des milliers de marocaines, son parcours quotidien s'apparente à celui du combattant. Cette jeune qui se déplace par train chaque jour que Dieu fait pour atteindre son bureau à Rabat est pour le moins affolée. La raison c'est qu'elle en a marre des inconnus qui sortent de nulle part et demandent un rendez-vous ou un numéro de téléphone. Elle témoigne, non sans ahurissement: «Ce que ces dragueurs embêtants n'arrivent pas à comprendre, c'est que je me fais belle pour moi-même et parce que la société le veut et l'exige. Si je ne réponds pas à une ou deux tentatives ratées, cela signifie que je n'ai pas envie de parler tout simplement». A l'instar de Fatima-Zahra, Maria est comme son entourage se plait à la décrire «la pudeur» ou «la timidité incarnée». Du haut de ses 178 centimètres, elle a beaucoup de mal à passer incognito où qu'elle aille.

Quand un faux-séducteur tente de la séduire, elle reste perplexe. Néanmoins, sa taille lui sert bien à quelque chose: «Lorsqu'un dragueur me fait des avances, je reste coite, mais je ne me laisse pas faire pour autant. Je m'arrête, le rouge aux joues, jusqu'à ce qu'il s'évapore dans la nature», avoue-t-elle. Une astuce qui ne marcherait peut-être pas avec les plus audacieux…

La drague est certainement devenue un sport national dans notre pays. Pour Abdellah Mamou, psychologue, il faudra plutôt se pencher sur les conditions sociales des adeptes de cette pratique. Ce spécialiste entrevoit: «La quasi-totalité de ces dragueurs n'ont pas la possibilité de draguer dans des endroits spécifiques. Il faut parler là d'un besoin naturel qu'ils ne peuvent pas contenir et qu'ils compensent d'une manière ou d'une autre».

Aussi, continue-t-il: «Cependant, quand le séducteur en herbe insiste, cela devient gênant, puisque l'acte de draguer se transforme en un harcèlement sexuel pur et simple. De plus, la formule ‘'bonjour beauté'' ne tarde souvent pas à virer à des paroles vulgaires ou déplacées. Ce qui prouve que la pratique a un objectif purement sexuel» Derrière cette pratique, malheureusement très en vogue, se cachent des clichés, des arrières pensées, un certain sentiment de frustration et toute une idéologie collective. Somme toute, avec ou sans ce projet de loi, la gent féminine continuera de militer au quotidien pour un peu de paix.
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La drague au féminin
Admettons-le, il n'y a pas que les hommes qui draguent. Certaines aventureuses n'hésitent pas à se prêter au jeu séducteur, si ce ne sont pas elles qui le mènent.

A vrai dire, tous les courants sont dans la nature ! Ces jeunes femmes qu'on appelle désormais les D.T.T (Dragueuses tout terrain!) n'y vont pas par quatre chemins, pour dénicher la perle rare. Tirées à quatre épingles, voiture ultra chic et yeux rieurs, ces audacieuses ne sont aucunement rebutées par l'étiquette d'allumeuses. S'il y en a qui préfèrent les boulevards, d'autres optent pour la terrasse d'un café pour une palette de choix plus diversifiée, d'autres encore font les «call-girls»…

Bref, tous les moyens sont bons pour lancer une nouvelle mode. Cette dernière n'est pas adaptée à tous les goûts, certes, mais la nature a voulu qu'elle fasse plus d'heureux que de gênés. Quoi qu'il en soit, les mentalités peinent à accepter les nouvelles idées. Vous avez dit prostituées? Le terme est fort, dirait-on. Finalement, il faut de tout pour faire un monde.



Par Houda Belabd | LE MATIN



21/04/2009
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